Comment mon ancêtre est morte au dépôt de mendicité à Poitiers ?

Publié le par GénéaBlog86

Marie GAUTIER (GAULTIER) nait le 27/04/1741 à Vouneuil-sous-Biard (86). Elle est la fille de Pierre GAULTIER et de Marie MESMIN. Elle épouse en sa paroisse en 1763, Jacques DUMUREAU natif de celle de Mézeaux (rattachée à celle de Ligugé (86)). Ils ont au moins sept enfants de 1765 à 1780. Jacques DUMUREAU meurt en 1801 à Vouneuil-sous-Biard, à l'âge de 66 ans. Visiblement, Marie se retrouve mendiante et sans ressources financières. Elle est donc placée au dépôt de mendicité à Poitiers, probablement à partir de 1812, lorsque les autorités locales tentent d'écarter de leur centre ville, les pauvres et personnes indésirables. Elle y meurt le 03/05/1814.

Le Centre Châtelleraudais d'Histoire et d'archives, dans son ouvrage "Les mendiants de la Révolution à la fin du XIXe siècle" (p. 17/29) retrace assez bien les conditions d'hébergement dans les abris sous roches situées de l'autre côté de la rivière du Clain, en dehors de la ville de Poitiers.

"Au cours de la répression de la mendicité au XVIIIe siècle, les indigents de Châtellerault étaient enfermés à l’Hôpital Général de Châteauneuf. A partir de 1793, les mendiants valides et les vagabonds sont enfermés dans la prison de Châtellerault ainsi que dans l’ancien dépôt de mendicité de Poitiers (c’est l’ancien couvent des Carmélites), qui reprend quelques activités à la fin de l’an X. Le sous-préfet de Châtellerault s’en félicite et en informe tous les maires de l’arrondissement, afin qu’ils dirigent sur Poitiers tous ceux qui ont droit à ce secours: «il y a tout lieu d’espérer que le nombre des vagabonds diminuera et avec lui les délits qu’en sont la suite». Un décret impérial du 5 juillet 1808, contre l’extension de la mendicité, décide la création d’un dépôt de mendicité dans chaque département. A Poitiers on apporte quelques aménagements au dépôt existant, qui commence à fonctionner fin 1811. Dès l’établissement du dépôt, tous les mendiants du département doivent être arrêté et y être traduits ; ceux qui n’ont aucun moyen de subsistance sont tenus de s’y rendre. Par la suite, tout mendiant doit être arrêté et s’il n’est pas réclamé par la famille dans les 8 jours il est écroué (pendant 3 à 6 mois), puis, il est traduit au dépôt de mendicité. Dans les départements où il n’y a pas de dépôt, les mendiants valides sont punis de 1 à 3 mois d’emprisonnement et s’ils sont arrêtés
hors du canton de résidence, l’emprisonnement va de six mois à deux ans. Les enfants de moins de 16 ans sont retenus au dépôt jusqu'à ce qu’il soient rendus aptes à gagner leur vie par le travail. Les jeunes enfants sont séparés des parents et envoyés à la campagne, puis en apprentissage. Les mendiants vagabonds sont arrêtés et traduits dans une maison de détention. La mendicité est «un vice dans l’homme social, et elle doit être réprimée [...]. Les dépôts de mendicité doivent donc être considérés moins comme des asiles, que comme des maisons de répression : il faut que le mendiant craigne d’y être enfermé [...] et il faut qu’il soit conduit à reprendre l’habitude du travail par la différence du sort des travailleurs et des non travailleurs» (qui ont une ration alimentaire réduite).

A Poitiers des indigents de toute sorte sont enfermés au dépôt dans une ambiance de cour des miracles ! On y trouve des aliénés, des fous furieux, quelques épileptiques, des filles publiques, des prostituées et des femmes pauvres pour y faire leurs couches (elles ne sont acceptées nulle part ailleurs), les vénériens, les galeux et des indigents valides. Tout le monde prend les repas dans le même réfectoire, à part les fous furieux enchaînés dans les loges. Des assiettes sont cassées presque tous les jours, les conditions d’hygiène sont déplorables."

Il est curieux de constater que la famille de cette veuve ne l'ait pas prise en charge, d'autant plus qu'elle était issue d'une branche de la famille AFFRAY (AUFFRAYS) des laboureurs en leur temps aussi monnayeurs de la monnaie de Poitiers au XVIe siècle et que ses enfants étaient toujours vivants et présents sur le canton, au moment de son enfermement au dépôt. C'est une interrogation qui ne trouve pas de réponse pour le moment...

 

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